Retour sur l'ouvrage « Il était une fois le bagne colonial »

Une vie au bagne vue par un fonctionnaire civil de l'administration pénitentiaire coloniale. C'était le thème de la conférence animée, lundi dernier, dans la salle de conférence du musée Ernest-Cognac, par Danielle Donet-Vincent, auteure du livre « Il était une fois le bagne colonial ».

Membre du groupe de recherche sur « les prisons de la République », dirigé par Michelle Perrot et Robert Badinter, Danielle Donet-Vincent a pu disposer des archives d'Albert Ubaud, qui a passé sa vie entre le bagne de Nouvelle-Calédonie et celui de Cayenne, de 1926 à 1943. Cet « exilé volontaire », lui-même fils de fonctionnaire civil de cette administration, a toute sa vie durant noté, photographié, dessiné, peint et commenté tout ce qui constituait les rouages de la puissante institution pénale. Rencontres de condamnés célèbres mais aussi commentaires sur ses collègues et supérieurs, notables et populations des colonies, le tout est surprenant à bien des égards et a plus d'une fois ému l'historienne.

Images interdites

Ubaud témoigne, mais fait également le « journaliste » en marchant sur les traces de Dreyfus à l'île du Diable. Souvent en bravant les interdits, il capte des images interdites comme celles des détenus et de leurs gardiens, « les porte-clés », ou de « La Martinière » (le bateau assurant le transport des condamnés de l'île de Ré aux bagnes, en mouillage à Cayenne). On y découvre ainsi les rapports complexes entre chaque strate de la colonie : les détenus et leurs gardiens, les colonisés et les relégués (ceux qui doivent rester hors métropole un temps égal à leur temps de détention et qui restent donc sur place en Guyane). Et aussi quel troublant témoignage de cette France coloniale avec ses exilés politiques d'Afrique du Nord et d'Indochine, qui côtoient les autres condamnés de droit commun.

Danielle Donet-Vincent a produit l'ouvrage à partir de cette masse de documents et d'archives. « Il était une fois le bagne colonial » (éditions Ibis rouge) a été remis ce même jour le tout au musée Ernest-Cognac de Saint-Martin-de-Ré.

À noter que l'éditeur Jean-Louis Malherbe, résident de Guyane, avait fait le déplacement avec son équipe pour fêter l'événement et présenter son ouvrage.